Paroles non confinées

Paroles non confinées
Partant du constat que les mesures politiques prises dans le cadre de la lutte contre COVID-19 ont, au bout d'un an, des conséquences néfastes sur l’animation d'enfants et de jeunes, le C-paje et ses affiliés cherchent des pistes d’actions pour continuer à exercer nos métiers, en adéquation avec le sens que nous voulons lui donner.
Nos pratiques, mais aussi la santé mentale des jeunes et des travailleurs, sont en jeu. Il nous a dès lors paru important de nous associer au mouvement Still standing for culture ce samedi 13 mars. 
Souhaitant encourager la création d’un espace d'expression libre et collective, nous avons proposé un dispositif d’interpellation citoyenne dans l’espace public, un espace d’échange où la parole de chacun est respectée et non confinée. Nous voulions faire sens ensemble.
Avec nos partenaires, (Le Jardin des Enfants, Latitude Jeunes, PhiloCité) nous avons formulé des questions sur une grande bâche blanche : Qui parle ? Quelle est la situation problématique depuis un an ? Quelle émotion est ressentie ? Quelle est ma revendication à ce sujet ?
Postés sur l’esplanade Saint-Léonard le samedi 13 mars entre 14h et 16h, nous avons vu défiler des personnes jeunes et moins jeunes, cyclistes et bipèdes, joyeux, colériques désespérés ou confiants...qui ont déposé leurs mots sur cette bâche devenue fresque collective.

Cette action s’inscrivait dans le cadre du mouvement Still standing for culture, rassemblement de circonstance visant à rappeler à quel point la culture, en tant que fabrique de liens sociaux notamment, est essentielle pour nous tous. Après une première journée d’actions le 20 février, le mouvement avait lancé un appel pour une seconde mobilisation ce samedi 13 mars, un an jour pour jour après le premier confinement. L’idée était « de permettre au secteur de sortir de son invisibilité et de son isolement forcés, de défendre la culture comme bien commun, de demander de sortir de la logique d’un régime d’urgence et d’exception, de rappeler qu’il n’y a pas de lien direct entre la nécessité de mesures sanitaires et la place à laquelle est reléguée la culture depuis près d’un an, de recommencer à faire culture, de forcer le monde politique à sortir de son silence et de son indifférence, et de défendre un principe de justice sociale et d’intérêt collectif », détaille le mouvement Still standing for culture dans son manifeste.
Plus de 300 actions étaient ainsi au programme ce samedi 13 mars dans toute la Belgique, dont une quarantaine en Cité ardente. Après avoir mené son action JeunesseSansCiel sur la place Saint-Léonard, l’équipe du C-paje a d’ailleurs rejoint la place Saint-Lambert, où convergeaient différents acteurs qui ont pris part à la journée de mobilisation. Acteurs culturels, sociaux, du secteur de la Jeunesse se sont rassemblés afin de faire entendre haut et fort le message porté par le mouvement Still standing for culture.

D’ailleurs, ce n’était pas la seule cause pour laquelle les citoyens se sont mobilisés ce week-end des 13 et 14 mars dans le centre-ville de Liège. Des manifestants du mouvement Black Lives Matter se sont dressés contre les violences policières ; les professionnels de l’Horeca ont fait entendre leur voix ; les Avocats du Climat ont manifesté à l’occasion de l’ouverture de l’action en justice menée par 60.000 belges à l’encontre des quatre ministres de l’Environnement du pays…
Et puis il y a aussi eu ces actes de violence qui ont occupé tout l’espace médiatique. On ne vous en dira pas plus que celles et ceux qui se sont déjà exprimés à leur sujet. On préfère vous relayer les propos de celles et ceux qui sonnent justes pour nous :

  • parce que, comme le dit le sociologue Marco Martiniello, "Ces jeunes sont le produit de notre société (...) La moindre tentative de compréhension et d’explication de ce type de comportements collectifs risque d’être immédiatement interprétée comme autant d’excuses et de justification de ces actes violents. Car, pour certains, c’est ce que font les sociologues : justifier l’injustifiable, aveuglés qu’ils sont par leurs bons sentiments et leur gauchisme viscéral teinté d’idéalisme naïf. Or, essayer de comprendre, n’est pas justifier. Essayer d’expliquer n’est pas excuser."
    Source : interview pour la rtbf publiée le 15 mars à 8h44
  • parce que nous étions samedi, comme le dit très bien Hugues Dorzée, journaliste, rédacteur en chef du magazine Imagine demain le monde dans un "Liège-en-pagaille, microcosme d’un pays en souffrance évoluant sous un ciel de braises et guettant, fatigué et impatient, ce fameux printemps annonciateur de jours meilleurs."
    Source : publication sur la page facebook d'imagine le 15 mars à 12h33

  • parce que, comme Lisette Lombé l'exprime si bien dans sa publication du 14 mars à 8h53 qu'on ne peut résister à vous livrer dans son intégralité, on a peur de ce qui nous attend : "Je repense encore à cette question de mon fils. Pourquoi être à ce point touchée? Hier soir, j'étais lasse. Je lui ai répondu que mon caractère de poétesse était ainsi fait. Au lieu de simplement lui dire que je m'inquiétais pour son avenir et le futur du monde."

  • parce que, comme Christine Mahy, présidente du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté, écrit en réaction à ce billet de Lisette Lombée au lendemain de sa prise de parole à Liège :
    "Les mots, bien plus que les mots, et les épaules de Lisette m'offrent la possibilité de m'adosser... d'adosser mes pensées, mon esprit, mon trouble...
    J'ai vu des choses hier à Liège, pas le tout... J'ai parcouru Stillstanding, pas le tout... Des "temps suspendus" contrastés avec lesquels mon cerveau, mes sentiments, ne savaient plus comment faire... Ma nuit a été très tourmentée ! Les mots, bien plus que les mots, et les épaules de Lisette m'aident à éclairer le trouble et à dissiper le tourment pour poursuivre encore et encore, plus que jamais. Comme si j'avais senti des mains sur mes épaules ce matin..."
    Source : publication facebook le 14 mars à 9h59

Last but not least :
« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’Hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés.

La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.

La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.

Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »

Don Helder Camara (7 février 1909 – 27 août 1999)

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Citoyennement vôtre,

L'équipe du C-paje

 

 

 

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